La prise en charge du Syndrome Gille de la Tourette et des tics chroniques par les neurosciences et le neurofeedback

13 décembre 2021 Sarah Dehan

Le Neurofeedback appliqué au Syndrome de Gilles de La Tourette et aux tics chroniques

 

Du fait du manque d’études scientifiques, le Neurofeedback était encore considéré comme expérimental auparavant. Mais malgré le peu d’études qui existaient, le Neurofeedback a déjà été utilisé par de nombreux praticiens pour traiter des pathologies telles que le syndrome de Gilles de La Tourette ou SGT.

Des premières études ont alors montré une amélioration des symptômes ainsi qu’une réduction des tics chez des patients TDAH avec des tics comorbides. C’est une des raisons qui a poussé les scientifiques à explorer cette voie thérapeutique et à étudier un peu plus l’efficacité du Neurofeedback sur les tics. L’objectif étant de faire du Neurofeedback un traitement alternatif ou complémentaire dans le SGT.

Une première revue de la littérature a déjà été réalisée en 2015, mais elle ne comprenait que quatre études portant sur le traitement des tics ou du SGT avec le Neurofeedback. Pour avoir une évaluation objective du potentiel thérapeutique du Neurofeedback, il semblait donc logique de réaliser une nouvelle revue de la littérature mondiale du Neurofeedback dans le SGT.

 

Qu’est-ce que le Syndrome de Gilles de la Tourette ?

Le SGT est un syndrome qui peut entraîner un handicap psychosocial important chez le patient. Par définition, c’est une maladie neurologique caractérisée par des tics involontaires, soudains et brefs se traduisant par des tics moteurs ou des tics sonores. Selon le DSM-5, le SGT associe des tics moteurs multiples à un ou plusieurs tics vocaux qui sont présents simultanément ou successivement. Ces tics peuvent varier en fréquence, mais doivent persister plus d’un an à partir de la première apparition d’un tic.

Les troubles du SGT apparaissent généralement dans les premières années de scolarisation et augmentent jusqu’à 10 – 12 ans et à l’adolescence, pour ensuite tendre à disparaître ou à diminuer en intensité à l’âge adulte. L’intensité des tics fluctue souvent au cours du temps et peut augmenter lors des situations de stress. La majorité des cas sont de sévérité moyenne, avec fréquemment des tics tels que les clignements d’yeux, une toux, des raclements de gorge, des reniflements ou des mouvements faciaux. Dans des cas rares et sévères, la production répétée et involontaire de mots obscènes est constatée (coprolalie). Fréquemment, le SGT peut être comorbide avec une dépression, un TDAH ou un TOC.

Parmi les échelles d’évaluation des tics ou du SGT, la YGTSS (Yale Global Tic Severity Scale) est la mieux validée scientifiquement et la plus utilisée dans les protocoles. Elle permet d’évaluer les caractéristiques des tics moteurs et vocaux, leur fréquence, leur intensité et leur retentissement sur la qualité de vie.

 

Physiopathologie du SGT

La cause exacte du SGT est encore mal connue, mais la physiopathologie impliquerait une composante génétique et des facteurs environnementaux. On parle d’une hyperactivité des neurones de la substance noire où est produite la dopamine. Cette dernière joue pourtant un rôle important dans l’inhibition des actions et des comportements. Il y aurait également un dysfonctionnement au niveau des circuits neuronaux impliquant les ganglions de la base, le thalamus et le cortex frontal.

Selon les études, trois hypothèses pourraient expliquer la physiopathologie du SGT, à savoir :

  • Une perte de contrôle inhibiteur au niveau des ganglions de la base.
  • Une dysrythmie thalamo-corticale, avec une activation ectopique de neurones pyramidaux corticaux sélectifs, amenant à une perception plus ou moins consciente des « urge to do » prémonitoires et à l’exécution du tic.
  • Un mécanisme compensatoire mis en place par le cerveau pour tenter de supprimer le tic.

A noter, la sensation de « urge to do » est une sensation subjective d’inconfort ou de tension musculaire conduisant le patient à réaliser le tic pour soulager la tension. Le tic est donc une réponse à l’urge, et effectuer le tic permet son soulagement.

 

Une nouvelle revue de la littérature sur le neurofeedback

En 2017, Anne-Claire DE LA ROCHE SAINT-ANDRÉ a réalisé une revue systématique de la littérature selon une méthode dérivée des critères édités par les recommandations internationales PRISMA (Preferred Reporting Items for Systematic reviews and Meta-analyses). Parmi les critères de sélection des études pour cette revue figuraient le type d’article, les outils utilisés et les critères d’analyse.

Les articles recherchés pouvaient aller du rapport de cas sur un patient aux essais avec ou sans contrôle et randomisation, en passant par des séries de cas incluant plusieurs patients. Les méthodes étaient celles faisant appel à l’EEG, à l’IRMf en temps réel et au MEG. Une attention particulière était donnée aux modalités d’évaluation de la sévérité des tics ou du SGT et aux comorbidités ou non avec le TDAH. Le protocole Neurofeedback, le nombre de séances et les traitements complémentaires étaient aussi analysés de près.

 

Caractéristiques des études

A l’issue de la recherche, 16 études ont été retenues, des études parues entre l’an 2000 et 2017. Parmi les échelles d’évaluation répertoriées, la YGTSS est largement utilisée. En effet, il s’agit d’une échelle de référence internationale pour déterminer la fréquence, la sévérité et le retentissement des tics. Le protocole Neurofeedback majoritairement utilisé est le protocole d’entraînement SMR. Le nombre de séances de Neurofeedback est compris entre 20 et 40 séances pour la majorité des études. La durée de chaque séance n’est pas précisée dans toutes les études, mais elle est comprise entre 15 et 50 minutes lorsqu’elle est précisée. Par ailleurs, la fréquence des séances est en moyenne de 2 ou 3 séances par semaine.

A ces séances de Neurofeedback ont été administrées simultanément des thérapies complémentaires dont la pharmacothérapie de référence (neuroleptiques), retrouvées dans 5 études, la médecine traditionnelle coréenne et d’autres modalités de biofeedback (EMG, GSR, température cutanée).

 

Résultat des études

Avec un taux d’échec compris entre 9 % et 25 %, la majorité des études ont montré des résultats significatifs sur les tics. En effet, on retrouve dans toutes les études une amélioration significative du trouble, avec une diminution de la fréquence et de la sévérité des tics. L’efficacité du Neurofeedback semble aussi supérieure et plus durable que la pharmacothérapie classique. Il se maintient dans le temps, avec une rémission maintenue à 6 mois. On remarque également que le Neurofeedback réduit de façon simultanée les symptômes de TDAH comorbides et certains troubles anxieux.

Globalement, cette revue de la littérature est en faveur d’une efficacité du Neurofeedback dans le traitement du SGT et des tics chroniques, principalement pour le protocole SMR. L’entraînement SMR entraînerait en effet de façon concomitante une réduction de l’activité thêta qui est excessive dans les régions fronto-centrales chez les patients SGT.

 

Pour en savoir plus sur le Neurofeedback basé sur l’EEG quantitatif et ses résultats sur le syndrome Gille de la Tourette, n’hésitez pas à nous contacter ici ou bien à consulter cette page.

Pour plus d’informations concernant le syndrome, nous vous invitons également à consulter le site de l’AFSGT: Association française du Syndrome Gille de la Tourette ici

 

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